Le 4 juillet 2024, dans la baie d’Avacha (Kamtchatka), les équipes de recherche de Russian Orca ont observé la naissance d’un jeune orque au sein d’un groupe local suivi depuis plusieurs années.

Ce type d’événement reste rare dans cette zone, selon les travaux de l’Institut Severtsov d’écologie et d’évolution affilié à l’Académie des sciences de Russie, en raison du faible taux de reproduction de cette population. La chercheuse Tatiana Ivkovich a confirmé l’observation du veau, déjà identifié par le code AV25. 

Cependant, les images capturées révèlent une corde de pêche épaisse enroulée autour de son corps.

Cette entrave pourrait provenir d’un engin de pêche perdu, un phénomène désigné sous le terme d’« engin fantôme ». Selon la FAO et le PNUE (2019), environ 640 000 tonnes d’engins de pêche sont abandonnées ou perdues chaque année dans les océans, avec des effets directs sur la faune marine.

Un nouveau-né déjà en danger de mort sur les côtes russes

Au bout du monde, sur la côte est du Kamtchatka, dans l’une des baies les plus sauvages et préservées de Russie, une femelle orque nommée AV25 par les chercheurs vient de mettre bas. Cet événement rare survient dans une région où les naissances sont peu fréquentes et où la survie des nouveaux venus reste incertaine en raison de multiples pressions environnementales, notamment liées au comportement des goélands.

Le 4 et 5 juillet, les équipes de Russian Orca accompagnées de la scientifique Tatiana Ivkovich identifient ce veau, mais la joie cède rapidement à l’inquiétude : le jeune orque arbore une corde épaisse qui serre déjà son corps fragile. Cette vision rappelle cruellement à quel point la vie des cétacés dépend du « ménage » réalisé par l’humain.

Actif, le petit garde le rythme de sa mère, mais rien n’est rassurant : une telle entrave sur un animal en pleine poussée de croissance est très dangereuse. Une blessure, une infection ou un étouffement peuvent survenir en quelques jours à peine. Or, les orques juvéniles sont très peu autonomes, incapables de se libérer sans aide extérieure. Pour les chercheurs, chaque heure compte, la situation pouvant vite dégénérer.

  • Dans la baie d’Avacha, où les naissances sont très rares, la perte du moindre veau accentue la vulnérabilité de la population locale, en raison notamment des adaptations des espèces marines.
  • La plupart des jeunes n’arrivent pas à l’âge adulte – la pression exercée par l’activité humaine accentue cette tendance.

Un piège d’origine humaine devenu quotidien pour la faune sauvage

Bien que les scientifiques n’aient pas encore déterminé avec certitude l’origine de la corde, l’hypothèse principale reste celle d’un engin de pêche abandonné ou perdu en mer — un phénomène répandu à l’échelle des océans. Les filets, cordes et lignes de pêche, souvent qualifiés d’« engins fantômes », continuent leur œuvre mortelle pendant des années, tout comme certaines espèces marines qui excellent en camouflage et adaptation.

Ce bébé orque n’est donc pas un cas isolé, mais bien un nouvel exemple d’une tragédie qui se répète de plus en plus fréquemment à travers le monde. Dans la baie d’Avacha, la population locale d’orques peine à se renouveler, alors que de tels incidents étaient inexistants avant l’intensification des activités humaines. Il devient urgent d’agir pour la biodiversité marine.

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Risques biologiques pour le cétacé

Chez les orques (Orcinus orca), les veaux dépendent étroitement de leur mère durant leurs premières années. Une contrainte physique, telle qu’un étranglement ou une lésion due à une corde, peut limiter la croissance, provoquer une infection ou entraîner un stress chronique. D’après Reeves et al. (2003), les enchevêtrements dans les engins de pêche représentent l’une des principales causes de blessures graves ou de mortalité chez les cétacés à dents.

Dans ce cas précis, l’animal semble actif et suit sa mère, mais les chercheurs restent préoccupés. L’identification rapide du groupe et les conditions météorologiques locales sont déterminantes pour toute tentative d’intervention.

La complexité d’une opération de sauvetage

Russian Orca prépare une intervention encadrée par des protocoles stricts, déjà utilisés lors de sauvetages similaires dans le Pacifique Nord. Selon NOAA Fisheries (2021), les tentatives de désenchevêtrement nécessitent une proximité contrôlée, un matériel spécialisé et une parfaite coordination entre observateurs, vétérinaires et marins expérimentés. Toute erreur peut aggraver la situation en provoquant la fuite de l’animal ou des blessures supplémentaires.

Au 19 juillet 2025, l’opération restait à l’étude, dans l’attente d’une localisation plus précise et d’une stabilisation des conditions maritimes.

L’impact mondial des “engins fantômes”

Le cas de l’orque AV25 n’est pas isolé. Le phénomène des “engins fantômes” est reconnu par les chercheurs comme une menace diffuse et persistante. Dans une étude publiée par Lebreton et al. (2018) dans Scientific Reports, ces déchets contribuent à hauteur de 10 à 40 % à la pollution plastique flottante dans certaines zones de concentration océanique.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes :

Proportion estimée des engins de pêche dans la pollution plastique de surface Zone géographique
10 % Océans mondiaux (moyenne globale)
40 % Vortex du Pacifique Nord (« grande plaque de déchets »)

Cordages, filets, hameçons et autres déchets issus de l’industrie piègent accidentellement de nombreux animaux marins — poissons, tortues, oiseaux, cétacés —, les condamnant parfois pendant des années. La mort par enchevêtrement figure parmi les principales causes de disparition des mammifères marins, touchant plus de 300 espèces recensées. Il est donc essentiel de assurer la sécurité des poissons.

  • De nombreux incidents ne sont jamais documentés, les victimes se retrouvant loin du regard humain, au cœur des océans.
  • La conséquence directe : la mort silencieuse d’animaux vulnérables et le déclin de populations déjà en difficulté.

Le cas du bébé orque piégé en Russie illustre tristement une crise trop longtemps ignorée, tout comme les adaptations de l’iguane marin face à leur environnement.

Espèces affectées et effets documentés

Les données rassemblées dans des rapports comme celui du Convention on Migratory Species (CMS) mettent en évidence les conséquences physiologiques et démographiques sur les espèces marines :

 
Espèces touchées Type de danger Exemples d’effets directs
Orques, dauphins Enchevêtrement, stress Étranglement, infection, difficulté à se nourrir, mort
Baleines franches Filets, cordes Chutes de population, blessures graves, reproduction menacée
Oiseaux marins, tortues Lignes, hameçons Asphyxie, blessures, incapacité à nager
Poissons divers Filets dérivants Mort, atteinte des chaînes alimentaires

Les mammifères marins sont particulièrement vulnérables, notamment en période de reproduction ou de migration. Dans l’hémisphère nord, les jeunes orques ont des taux de survie réduits en raison des perturbations anthropiques (Ford et al., 2009).

Enjeux écologiques et leviers d’action

Au-delà du sauvetage d’un individu, les biologistes marins insistent sur la nécessité de réduire les sources de pollution à la source.

Parmi les mesures considérées comme prioritaires par l’ONU Environnement et la FAO :

  • Renforcement des réglementations contre l’abandon des engins de pêche.

  • Mise en place de systèmes de traçabilité des filets.

  • Déploiement de programmes de récupération des déchets marins.

  • Sensibilisation des usagers de la mer aux impacts écologiques à long terme.

  • Soutien aux certifications écoresponsables dans la filière halieutique.

Les campagnes de nettoyage et les dispositifs de signalement participatif, comme le Global Ghost Gear Initiative (GGGI), sont également cités comme des leviers concrets.

Les scientifiques multiplient les appels pour limiter la casse :

  • Consommer moins de poissons et produits issus de la mer, pour diminuer la pression sur les écosystèmes et les risques de captures accidentelles.
  • Éviter de jeter le moindre déchet lors des promenades au bord de mer ou lors des sorties en bateau : chaque bout de corde ou de plastique ramassé est une vie sauvée.
  • Défendre des lois bien plus strictes contre les engins de pêche perdus ou abandonnés, et soutenir des techniques plus propres pour la pêche.
  • Se tourner vers des labels ou certifications qui garantissent des pratiques responsables et contrôlées.
  • Participer à des actions locales de nettoyage des plages et des littoraux.

Un simple geste peut éviter des mois de souffrance : une corde coupée ou ramassée, c’est peut-être un orque ou une tortue qui retrouvera la liberté. Les citoyens, les pêcheurs, les autorités et les consommateurs ont tous un rôle essentiel à jouer.

Comprendre l’importance écologique des cétacés

Les cétacés jouent un rôle central dans le fonctionnement des écosystèmes marins. Leur présence influence la structure des chaînes alimentaires, la régulation des stocks de poissons et même le cycle du carbone via la « pompe biologique » (Roman et al., 2014).

Protéger ces espèces, c’est préserver un équilibre fragile mais fondamental.

Cétacé Particularité extraordinaire Signe distinctif
Cachalot Record de plongée, plus gros cerveau du règne animal Dort la moitié du cerveau éveillée, capable de plonger très profond
Orque Plus grand des dauphins, intelligence remarquable Surnommée « baleine tueuse », chasse collective sophistiquée
Béluga Chants complexes, sociabilité Appelé « canari des mers », front bulbeux source de nombreux sons
Narval Défense géante de 3 mètres La fameuse « licorne des mers », dent très sensible
Baleine bleue Animal le plus massif de la planète Jusqu’à 30 mètres et 180 000 kg, 40 millions de krill avalés chaque jour
Baleine à bosse Sauts acrobatiques et chants envoûtants Migrations parmi les plus longues du règne animal
Baleine franche de l’Atlantique nord Espèce extrêmement menacée, faible nombre de femelles Moins de 300 individus restants, gravement impactée par la pêche
Cachalot nain Petite taille chez les cétacés 2 à 2,7 m seulement, poids plume de 130 à 270 kg
Baleine boréale Longevité record Jusqu’à 200 ans, bouche géante à fanons de 3 m
Baleine de Minke Espèce à la fois chassée et rapide Difficile à observer, proie des baleiniers

Une vigilance à renforcer

Le suivi scientifique, la collecte de données et la documentation de ces incidents sont essentiels pour orienter les politiques publiques. Le cas de l’orque AV25 pourrait ainsi contribuer à renforcer la lutte contre les engins fantômes et soutenir les programmes de conservation ciblée.

Partager la responsabilité pour un avenir marin préservé

L’enjeu va bien au-delà de l’histoire de ce bébé orque : sans action à tous les niveaux, d’autres baleines, orques, dauphins ou oiseaux marins risquent de subir les conséquences de notre négligence. Que ce soit sur la plage, sur les marchés, dans les lois ou même dans le choix d’un aquarium d’eau douce, nos décisions quotidiennes peuvent inverser la tendance.

Ramasser une corde, limiter sa consommation de poisson ou demander un entretien rigoureux des équipements de pêche : chaque geste compte. La survie du bébé orque du Kamtchatka, comme celle de milliers d’animaux marins, dépend autant de la conscience collective que de la réactivité des chercheurs. Pour en savoir plus sur les mystères des océans, découvrez Abysses et leurs secrets.

Les océans regorgent de merveilles insoupçonnées, comme les caractéristiques du poisson-ballon. À chacun de nous de les protéger, pour que la naissance d’un jeune orque ne soit jamais synonyme de condamnation à mort.

Sources principales